Un récupérateur d’eau de pluie pour la terrasse

Remarque : ce projet n’a pas été mené à son terme. J’ai laissé cet article plusieurs années dans mes brouillons en attendant de le terminer. Mais je dois me rendre à l’évidence, je ne projette pas de revenir dessus à court ou moyen terme. Je le publie donc en l’état…

Puisque je suis sensible aux problèmes environnementaux et que j’ai la chance d’avoir une descente d’eau pluviale qui passe par ma terrasse, il n’était pas envisageable pour moi de ne pas valoriser ce cadeau du ciel.

Et vous me connaissez, il n’était pas envisageable non plus de ne pas ajouter un peu d’électronique là-dedans :-).

Nous sommes au printemps 2019, le projet part donc d’un tonneau en chêne d’une centaine de litres récupéré chez mes grands-parents. On aperçoit sur la photo la canalisation fléchée sur rouge sur laquelle je vais me repiquer.

L’objectif est donc de stocker l’eau de pluie afin de la réutiliser pour l’arrosage, qui sera prochainement automatique (très utile pendant les vacances !). Je vais également installer une sonde de niveau à l’intérieur pour connaître l’état de son remplissage.

Principe de fonctionnement

Parce qu’un schéma vaut mieux qu’un long discours, voici comment fonctionne le système :

La conduite d’eau pluviale est légèrement raccourcie pour pouvoir insérer en-dessous un bac qui contient une pompe de relevage : un flotteur détecte son remplissage et déclenche une pompe 12V immergée lorsqu’un certain niveau est atteint. Cela transvase le contenu du bac dans le tonneau.

Si le débit d’eau pluviale apportée est supérieur à celui de la pompe, le bac déborde et l’eau coule là où elle allait initialement, à savoir sous ma terrasse. De même, si le tonneau est plein, il déborde sans que cela ne pose de problème.

Pour vider le tonneau, impossible de compter sur la gravité : il faudrait installer un robinet tout en bas de ce dernier, hors il sera posé à même le sol. C’est donc une deuxième pompe qui permet de puiser de l’eau à la demande.

Première étape : la pompe de relevage

J’installe deux flotteurs pour obtenir un hystérésis : la pompe démarre quand le niveau de l’eau dépasse le flotteur du haut et s’arrête lorsqu’il passe en dessous de celui du bas.

Le système est alimenté en 12V et le comportement bistable est obtenu en tirant profit qu’un transistor MOSFET ne consomme pas de courant sur sa grille. On peut alors connecter un condensateur en parallèle, que le flotteur du haut charge et que le flotteur du bas décharge. Lorsque le niveau de l’eau est entre les deux, le condensateur reste chargé ou déchargé, suivant l’état précédent, (quasi) indéfiniment.

Le schéma ressemble donc à cela :

Les résistances permettent d’éviter un court-circuit si les deux flotteurs sont par erreur activés simultanément (ce qui est théoriquement impossible, cela signifierait que l’eau est à la fois en-dessous de celui du bas et au-dessus de celui du haut).

Je m’équipe donc d’une petite pompe 12V ainsi que de deux flotteurs de ce type :

Attention, le sens de montage des deux flotteurs est opposé, pour que celui du bas soit actif lorsque l’eau est en-dessous de lui et que celui du haut soit actif lorsque l’eau est au-dessus :

Première étape bis : la pompe de relevage

L’hystérésis apporté par les deux flotteurs était une fausse bonne idée : ils se coincent deux fois plus souvent…

Du coup, je reviens à un système plus simple avec un seul flotteur. La pompe est activée après un retard lorsque le flotteur s’active, et est désactivée après un autre retard lorsqu’il se désactive.

Après la bascule RS du pauvre, voici la temporisation du pauvre (qui fait aussi office de soft-start et de soft-stop, par la même occasion) :

Lorsque le contact se ferme, le condensateur se charge à travers la résistance du haut. Après quelques secondes, lorsque la tension est suffisante pour faire conduire le transistor, la pompe s’active. La résistance du bas, de plus forte valeur, est négligeable.

Lorsque le flotteur se déconnecte, elle décharge lentement le condensateur. La pompe s’arrête après un temps plus long, pour que la pompe vide complètement le bac.

Seconde étape : restaurer le tonneau

Je profite du confinement au printemps suivant (2020) pour améliorer l’esthétique du tonneau. Il n’est pas tout jeune et ni en excellent état. Après une bonne phase de ponçage, le bois est lasuré et les cerclages métalliques peints en noir : cela lui donne tout de suite bien meilleure allure.

L’arrosage est encore manuel, en activant la deuxième pompe, immergée dans le tonneau. Je commence à réfléchir à automatiser tout ça, grâce à un goutte-à-goutte et un microcontrôleur pour commander la pompe. J’aimerais également bien connaître la quantité d’eau restante à l’intérieur.

Troisième étape : construire une sonde de niveau

Pour connaître le volume d’eau disponible dans le tonneau, il y a plein de possibilités :

  • Mesurer sa masse,
  • Détecter la présence d’eau à différentes hauteurs (via des flotteurs mécaniques ou la conductimétrie du liquide),
  • Mesurer avec un télémètre la hauteur d’eau,
  • Créer une sonde de niveau capacitive,
  • etc.

J’ai opté pour l’installation à plusieurs hauteurs d’électrodes permettant de détecter par conductimétrie si celle-ci est immergée ou pas. Je pense que cela permet d’avoir un bon compromis entre la facilité de réalisation (très peu de mécanique ou d’électronique complexe à réaliser) et la fiabilité de la mesure.

Concrètement, je pars d’un profilé d’aluminium en U sur lequel j’installe à plusieurs hauteurs des vis en inox. Elles sont isolées grâce à des entretoises en nylon et des isolateurs pour transistors TO-220. Un fil est connecté à chaque vis et un dernier est connecté au profilé lui-même :

Si une vis est immergée, il y a conduction électrique grâce à l’eau entre celle-ci et le fil de référence relié au profilé entier. Dans le cas inverse, il n’y a pas de conduction.

En pratique, cela donne ceci. Les rectangles verts matérialisent le futur profilé :

Il faut maintenant percer le profilé pour installer chaque vis. J’ai choisi d’en répartir 12 sur toute la hauteur du tonneau :

J’ai plié à 90° les 3 faces du profilé sur son extrémité gauche pour pouvoir le fixer à l’intérieur du tonneau. Une fois les vis et cosses installées, cela ressemble à ceci :

Les fils noirs correspondent aux 12 vis (et donnent donc l’information de 12 niveaux d’eau) et le bleu est la référence, connectée directement au profilé :

La partie intérieure du profilé ne doit surtout pas être en contact avec l’eau. Pour l’étanchéité, je vais donc le remplir de résine époxy, après l’avoir bouché avec du scotch de chaque côté.

Cette résine est venue sous forme de deux composés à mélanger dans des proportions précises :

Niveau électronique, un microcontrôleur sera dédié à la sonde. Pour ce genre de tâche simple, j’aime bien utiliser les microcontrôleurs PIC 8 bits de Microchip. Pour ce projet, le PIC16F628A sera utilisé notamment car il a l’avantage d’exister au format traversant (DIL16).

Chaque vis est reliée à un GPIO du microcontrôleur et à une pull-up de 2,2MΩ. Lorsque la vis est émergée, on lit donc un état haut sur la broche. Lorsque la vis est immergée, la conductivité de l’eau tire la broche à la masse. L’eau de pluie est assez conductrice grâce à ses impuretés.

Le programme est très simple. Il lit en boucle l’état de ses GPIOs et envoie une trame ASCII indiquant si chaque vis est immergée ou non :


/*
Damien Favre, août 2020

Renvoie le niveau d'eau du tonneau sur un UART en boucle
La trame fait 14 octets : \r XXXXXXX_____ \n
Les 'X' signifient que le capteur est immergé, sinon c'est '_'
Compilateur : MikroC pro for PIC

PB2 : TX @ 9600 bds

*/


void main()
{
  char trame[15];

  // Si l'oscillateur interne a été activé dans les options du projet, il tourne par défaut à 4MHz

  CMCON = 7; // pas de comparateur
  TRISA = 0xFF; // tout en entrée
  TRISB = 0xFF; // tout en entrée

  UART1_Init(9600);
 
  delay_ms(1500); // attente que les capas parasites se chargent, que les potentiels s'établissent
  while(1)
  {
      // On remplit la trame à envoyer sur le port série
      trame[0] = '\r';
      trame[1] = !PORTA.F0 ? 'X' : '_';
      trame[2] = !PORTA.F2 ? 'X' : '_';
      trame[3] = !PORTB.F3 ? 'X' : '_';
      trame[4] = !PORTA.F4 ? 'X' : '_';
      trame[5] = !PORTA.F6 ? 'X' : '_';
      trame[6] = !PORTB.F5 ? 'X' : '_';
      trame[7] = !PORTB.F6 ? 'X' : '_';
      trame[8] = !PORTA.F7 ? 'X' : '_';
      trame[9] = !PORTB.F7 ? 'X' : '_';
      trame[10] = !PORTA.F1 ? 'X' : '_';
      trame[11] = !PORTA.F3 ? 'X' : '_';
      trame[12] = !PORTB.F0 ? 'X' : '_';
      trame[13] = '\n';
      trame[14] = '\0';

      UART1_Write_Text(trame);
      delay_ms(500);
  }
}

Remarque : j’ai pris des résistances de 2,2MΩ de manière très empirique. Il aurait peut-être été préférable d’entrer sur 12 canaux analogiques et de renvoyer la valeur brute pour laisser plus de flexibilité pour filtrer les données.

La sonde s’interface donc avec seulement 3 fils : alimentation 3,3/5V, masse et UART :

Cette carte électronique sera immergée, il faut donc l’étanchéifier. Pour ça, ma recette est le pistocolle et la gaine thermorétractable : je badigeonne la carte de pistocolle et une fois refroidie, j’enfile par dessus un morceau de gaine thermorétractable. Ensuite, avec un pistolet à air chaud, je chauffe le tout : la gaine va se rétracter, la colle va fondre et remplir l’espace. Le surplus coulera ensuite par les extrémités. Une fois refroidie, l’étanchéité est parfaite :

Pour que cela fonctionne bien, il faut être généreux en colle au niveau du centre de la carte et moins sur les bords, et commencer à chauffer le centre. Ainsi, la gaine se rétracte à partir du centre et pousse la colle fondue vers les deux extrémités en chassant l’air. Le but est qu’il y ait le moins possible de bulles à l’intérieur.

Pour info, noyer dans carte dans du mastic silicone (sanitaire) est une fausse bonne idée : lorsque ce type de mastic durcit, il libère de l’acide acétique qui est très corrosif.

Quatrième étape : aménager une trappe de visite

J’ai pour seul accès à l’intérieur du tonneau le trou au centre de l’une des lames. Ce n’est pas assez gros pour passer la sonde de niveau et j’aimerais bien avoir un accès plus confortable à l’intérieur pour le nettoyage des alluvions.

Après avoir beaucoup hésité, je décide d’installer une trappe de visite sur la face inférieure du tonneau. Pour cela, je visse généreusement sur les lames de bois une plaque de PVC de 5mm d’épaisseur badigeonnée de mastic. Lorsque les lames seront coupées, les lames devront rester bien maintenues, d’où le nombre important de vis.

Une fois la plaque en place, je peux la découper en même temps que les lames à la scie sauteuse pour encastrer un tampon de visite PVC de diamètre 200 mm (à acheter chez un revendeur de matériel professionnel, en GSB on ne trouve rien au-delà de 100 mm). Ce dernier est solidaire de la plaque grâce à de la colle PVC :

Dégâts sur le tonneau…

Nous sommes à la fin de l’été 2020, le tonneau est resté vide plusieurs semaines pendant la canicule ainsi que tout l’hiver précédent. Et comme on dit, tonneau séchu tonneau foutu. Et oui, c’est l’humidité qui fait gonfler le bois et maintient les morceaux de bois (il paraît que le nom scientifique est douelles ou douves) serrés entre eux grâce aux cerclages métalliques.

Une fois sec, le bois se rétracte énormément et le tonneau n’est plus du tout étanche :

Si les dégâts ne sont pas trop graves, on peut normalement retrouver l’étanchéité en le faisant regonfler. Au printemps 2021, je tente donc le tout pour le tout :

Cela ne sera pas suffisant. L’étape suivante a été de l’immerger entièrement dans un grand sac poubelle de 150L rempli d’eau pendant plusieurs jours, sans meilleur succès.

Déçu, je dois me rendre à l’évidence que ce tonneau ne sera définitivement plus étanche. Si je veux m’en servir à nouveau, il faudra que je le double d’un sac ou autre paroi similaire. Pour le placer à l’intérieur, il faudra donc que je découpe la partie supérieure, ce qui est dommage.

Je laisse donc de côté le projet, d’autant plus que la descente d’eau que j’exploite n’est pas très généreuse. Je ne sais pas comment elle est construite au niveau de la toiture, mais il faut beaucoup de pluie pour que de l’eau commence à arriver. On dirait qu’il s’agit d’un genre de trop-plein. Par conséquent, il faut un gros orage ou une pluie de plusieurs heures pour commencer à récolter quelque chose. En pratique, 2 pluies sur 3 ne m’apportaient rien.

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